Anxiété sur le lieu de travail : briser le silence

A woman standing at a dock and looking at the water
Getty Images/ Martin_dm

L’anxiété et les crises de panique peuvent survenir à tout moment, et notamment au bureau. Claire Eastham prend la parole pour aider à briser la stigmatisation.

« Tu l’as enfin fait. Tu as gâché ta vie. »

Je cours le long du Strand à Londres, en sanglotant de manière hystérique. Les gens me regardent, mais je m’en fiche. Je ne me soucie plus de rien.

Tout ce que je veux faire, c’est m’enfuir.

Dix minutes plus tôt, je participais à une réunion importante. Je m’adressais à une salle de 20 personnes lorsque cela a frappé. Les palpitations, les sueurs, les difficultés à respirer. J’ai cru que j’étais en train de mourir ou de perdre la tête. Quoi qu’il en soit, j’ai dû partir immédiatement.

Le lendemain, on m’a diagnostiqué une anxiété sociale et des crises de panique. Il a fallu environ trente secondes au médecin pour mettre une étiquette sur le monstre qui me traquait depuis des années.

« Vous n’avez pas alerté votre manager ou le département des RH ? », m’a-t-il demandé. J’ai failli lui rire au nez. Non, je n’ai alerté personne au travail. En réalité, je cachais activement mon état depuis dix ans. Que penseraient mes collègues si j’admettais que je souffre d’anxiété ? J’étais certaine qu’on ne me ferait plus jamais confiance dans le cadre professionnel.

Et si l’on « découvrait » mes crises de panique ?

Il s’avère que je n’étais pas la seule à adopter cette attitude. En 2020, 828 000 personnes ont déclaré ressentir du stress et de l’anxiété liés au travail. Pourtant, selon la BBC, 80 % des personnes interrogées en 2020 ont essayé de « surmonter » leur anxiété plutôt que de se mettre au repos. Cela pourrait être dû à la peur d’être jugé négativement par les collègues ou la direction.

Lucy Graves, une responsable des relations publiques à Manchester, a décidé de quitter un emploi qu’elle aimait lorsque sa santé mentale a décroché. Sa peur d’être « découverte » et d’être considérée comme « folle » l’a emporté sur son désir d’être honnête au sujet de son état.

Voici ce qu’elle m’a dit :

« A chaque fois que mon manager me demandait de prendre le lead sur une présentation à un client, je paniquais. Il ne savait pas que je souffrais d’anxiété et j’étais terrifiée à l’idée de perdre mon emploi s’il l’apprenait. Je ne pouvais ni dormir ni manger les jours qui précédaient la présentation, et une fois celle-ci terminée, je m’enfermais dans les toilettes pour pleurer. J’ai quitté l’entreprise avant que l’on découvre ma maladie ». (Lucy Graves)

Je lui ai demandé si elle avait envisagé d’en parler à son manager avant de démissionner.

« Non. Je craignais qu’il informe d’autres employeurs ou contacts que j’étais folle. Je ne pouvais pas prendre ce risque. Il était préférable de partir ». (Lucy Graves)

Si je n’avais pas vécu quelque chose de similaire dans ma propre vie, j’aurais trouvé l’histoire de Lucy incroyable. Cependant, cette peur d’être démasqué en direct par l’employeur peut être écrasante.

Après mon diagnostic, j’ai pris un congé sans solde et j’en ai profité pour créer mon blog. Je voulais partager mon expérience et aider d’autres personnes à mieux comprendre le monde des maladies mentales ! Il est important que nous comprenions les maladies, car cela contribuera à réduire la stigmatisation.

Mettre fin à la stigmatisation

Avant de reprendre le travail, j’ai également effectué des recherches sur mes droits. J’ai découvert qu’au Royaume-Uni, les maladies mentales sont couvertes par la loi Disability Discrimination Act (loi sur la discrimination à l’égard des personnes handicapées), ce qui prohibe tout acte de discrimination de la part d’un employeur. Pour dire les choses simplement, une personne ne peut pas être licenciée parce qu’elle souffre d’anxiété.

Cette peur de perdre mon emploi à cause de ma maladie était non seulement irrationnelle, mais aussi erronée.

En ce qui concerne l’attention adéquate à apporter à la santé mentale sur le lieu de travail, des organisations telles que la Mental Health First Aid (MHFA) tentent de faire évoluer la compréhension des employeurs, en particulier dans les grandes entreprises. MHFA organise des sessions qui forment la direction au bien-être mental et à la manière de soutenir un salarié en difficulté. Extrait de leur énoncé de mission : 

« Nous avons tous des problèmes de santé mentale. Une meilleure santé mentale est bénéfique pour tous et le reconnaître est essentiel pour la société.

Nous voulons une société où chacun peut s’épanouir. Nous estimons que la santé mentale ne doit faire l’objet d’aucune stigmatisation. Nous voulons que la santé mentale soit ouvertement discutée et soutenue.

Nous souhaitons que nos formations créent la certitude absolue que nous pouvons tous parler librement de la santé mentale et demander de l’aide lorsque nous en avons besoin. Nous y parviendrons grâce à notre mission qui consiste à former une personne sur dix à la sensibilisation et aux compétences en matière de santé mentale ».

Prendre le contrôle

Mais en fin de compte, c’est à la personne (donc à VOUS) de préserver sa propre santé mentale. Pour reprendre une de mes analogies préférées... Souffririez-vous en silence si votre jambe était cassée ? Ou si vous aviez des vomissements cinq fois par jour ? J’aime à penser que non. Le cerveau mérite le même respect que le corps.

Mon expérience m’a appris qu’il est temps d’agir :

  • Lorsque je ne me sens pas bien dans ma peau, c’est-à-dire quand les pensées et les sentiments négatifs qui tournent en boucle dans ma tête commencent à affecter ma vie quotidienne de façon continue.
  • Lorsque je me sens plus émotive ou fatiguée que d’habitude et que mes habitudes de sommeil changent.
  • Lorsque j’observe un changement d’appétit, par exemple, je mange à l’excès ou, au contraire, je saute complètement des repas.
  • Lorsque je suis réticente à participer à des activités sociales.
  • Lorsque j’ai beau essayer, mais que je n’arrive pas à me déconnecter.

Comment obtenir de l’aide :

  • La première étape est simple : allez voir votre médecin généraliste. Dressez une liste des symptômes et soyez honnête.
  • Si vous avez besoin d’une période de repos, PRENEZ-LA. Votre cerveau, comme votre corps, peut avoir besoin de temps pour guérir.
  • Connaissez vos droits, tant au sein de l’entreprise pour laquelle vous travaillez qu’en général. Informez-vous sur la politique de votre entreprise en matière de santé mentale et de maladies chroniques.
  • Planifiez une réunion avec votre supérieur hiérarchique et un membre des RH (si possible), expliquez comment vous vous sentez et demandez-leur ce qu’ils peuvent faire pour vous aider.
  • Acceptez de ne pas vous sentir bien et soyez indulgent(e) avec vous-même. Vous n’êtes pas pathétique, vous êtes humain !

Le point à retenir

Si je pouvais remonter le temps et retrouver cette femme hystérique sur Le Strand, je lui dirais :

« Ce n’est pas grave, tu souffres d’anxiété. Ce n’est pas un crime ! Il existe des moyens de gérer cette situation, et si ton employeur ne veut pas te soutenir, il y a de meilleures entreprises pour lesquelles travailler. ».

COB-FR-NP-00078 – 09/2023

Comment avez-vous trouvé cet article:

Partager sur les Réseaux sociaux:


Ces articles peuvent vous intérésser


Man sitting on a bench by the sea
article

Le langage codé de la dépression : ce que nous disons versus ce que nous pensons

Par Bryce Evans

Man and woman in bed
article

Comment parler de son anxiété à un·e proche

Par Claire Eastham

Tired man looking at his phone
article

L’influence des réseaux sociaux nuit-elle à notre santé mentale ?

Par Martin Gallagher