Comment parler de son anxiété à un·e proche

Man and woman in bed
Getty Images / silverkblack

Il est difficile de parler pour la première fois à un·e proche de votre état de santé mentale. Claire Eastham nous raconte son expérience personnelle en la matière.

Pendant la première année où j’étais en couple avec mon petit ami, je souffrais d’un trouble anxieux. Malheureusement, je n’avais pas été formellement diagnostiquée à l’époque et, comme beaucoup de personnes, je me suis dit que c’était juste une « faiblesse de caractère ». Cela ne justifiait sûrement pas une consultation chez le médecin, vous êtes d’accord ? Je pensais pouvoir contrôler ce trouble toute seule, avec de l’autodiscipline et en me punissant.

La plupart du temps, j’étais très douée pour le dissimuler (je crois que j’aurais pu remporter un Oscar !). Cependant, dans les occasions où la « folie » transparaissait, comme la fois où je me suis enfermée dans une salle de bain d’hôtel pour pleurer pendant une heure et demie, je me servais principalement de deux excuses pour expliquer mon comportement :

  1. « Je suis épuisée » et
  2. « J’ai mes règles. »

Comment allais-je bien pouvoir lui expliquer mes véritables sentiments et peurs, à lui, mon petit ami ? C’était la personne la plus rationnelle et la plus pondérée que j’aie jamais rencontré. « Il va te quitter », chuchotait mon anxiété. « Tu es pathétique. Tu veux vraiment qu’il sache à quel point tu es pathétique ? »

Sur les conseils de ce « démon de l’anxiété », j’ai décidé de tout réprimer et de garder le silence.

Je vous le dis tout de suite, c’était littéralement la PIRE chose que j’aurais pu faire !

Trois mois passent, et soudain, je me retrouve à courir comme une dératée dans notre appartement, en criant et en pleurant, pendant qu’il m’observe, horrifié. Réprimer mon anxiété pendant tant d’années avait fini par déclencher une dépression impossible à ignorer.

J’ai réalisé que je ne pouvais plus faire face seule. J’avais besoin d’aide.

Pourquoi est-il si difficile d’en parler ?

Tout d’abord, la culpabilité et la détestation de soi que j’ai ressenties étaient écrasantes. Sans parler du caractère secret qui entoure tout cela. Le Dr David Carbonell (psychologue clinicien américain spécialisé dans le traitement de l'anxiété sous toutes ses formes) parle du « secret et [de] la révélation de soi » en lien avec les attaques de panique et l’anxiété. Il affirme qu’une personne garde le secret sur ses problèmes d’anxiété parce qu’elle est persuadée qu’un proche réagira négativement. Il écrit : « Les personnes souffrant de troubles anxieux ont tendance à imaginer le pire et, par conséquent, se retrouvent dans un état émotionnel qui reflète leurs pensées négatives. »

En gros, sans aucune preuve, une personne va se convaincre qu’un proche ressentira du dégoût à son égard, ce qui peut déclencher une réaction émotionnelle négative. La peur qu’un membre de la famille proche puisse penser du mal d’eux, ou pire, les abandonner complètement, est ce qui maintient les gens dans le silence. 

Nina, une stagiaire en technologie commerciale de Bombay, âgée de vingt ans, m’a parlé des limites de sa culture et de la raison pour laquelle elle estime devoir garder secrets ses problèmes de santé mentale. « Mes parents sont des hindous stricts, qui se concentrent sur les apparences. Ils pensent que nous devrions pouvoir contrôler notre esprit sans aide extérieure. » Nina explique également que ses parents considèrent ses troubles comme une faiblesse, qui pourrait mettre en danger ses chances de trouver un mari. « Mes parents ne sont pas de mauvaises personnes, ils ne comprennent tout simplement pas. Je veux trouver un moyen de leur expliquer mes difficultés psychiques d’une manière claire et concise. »

J’ai dû m’aider moi-même, avant que les autres ne puissent m’aider

Ma prise de conscience est survenue alors que j’étais en convalescence depuis six semaines. J’étais dans la salle d’attente du médecin, j’ai feuilleté un « Guide des premiers secours » qui était à disposition (clairement, il n’y avait pas grand-chose à lire) et j’ai lu un chapitre « que faire en cas d’étouffement » et les gestes à effectuer si quelqu’un avait besoin d’aide. Jusqu’à ce moment précis, je rencontrais encore des difficultés à exprimer mon anxiété. Pourtant, là, je me suis dit que je pourrais peut-être écrire quelque chose de similaire à une brochure de premiers secours, mais sur mon expérience avec l’anxiété. Après tout, on écrit bien sur les pathologies physiques, alors pourquoi pas sur les problèmes de santé mentale ?

Plus tard, de retour chez moi, j’ai préparé un document en deux parties, qui énumérait ce que l’anxiété me faisait ressentir, à la fois physiquement et émotionnellement. J’ai également listé les choses qui la soulageaient et celles qui l’aggravaient.
Mon petit ami, (qui est depuis devenu mon mari !) a trouvé ce document d’une aide précieuse, et à ce jour, il le garde toujours sur sa table de chevet. Il m’a dit que c’était sa « carte pour comprendre mon cerveau ». Un outil qui l’aide à m’aider.

Voici les meilleurs conseils pour « s’ouvrir » à un proche :

  • Choisissez le bon moment et le bon endroit

    Ne le faites pas pendant son émission de télévision préférée ou pendant qu’il regarde un match captivant, ou sur le trajet de retour du travail ! Demandez-lui plutôt s’il peut vous consacrer 30 minutes de son temps pour parler d’un sujet important. Cela aidera à le préparer à la suite.

  • Préparez ce que vous voulez dire

    Réfléchissez à l’avance à ce que vous voulez dire. Prenez des notes si cela vous met plus à l’aise. Soyez aussi clair·e et précis·e que possible. Dites, par exemple, « Je souffre d’un trouble qui s’appelle « x ». VOICI comment je me sens ... et VOICI comment tu peux m’aider ».

  • Trouvez de la documentation pour vos proches

    Ce n’est pas nécessairement un document que vous aurez rédigé vous-même. Il existe de nombreuses sources d’informations précieuses (assurez-vous simplement de les obtenir auprès de sources fiables !) Il peut s’agir de liens vers des sites Web utiles ou de livres. Les gens ont tendance à apprendre à leur propre rythme, mais les orienter dans la bonne direction sera utile.

  • Solliciter le soutien d’un tiers

    Si vous vous inquiétez de la réaction de votre proche, demandez à votre médecin, votre infirmier/-ère ou votre psychothérapeute de vous assister pendant la conversation.

  • Donnez du temps à votre proche

    Ne vous attendez pas à obtenir immédiatement la réaction que vous souhaitez. Votre proche pourrait ne pas comprendre, ou cela pourrait susciter des réactions émotionnelles. Encouragez-le ou -la à poser des questions et suggérez d’en reparler le lendemain.

Le point à retenir

N’oubliez pas que vos proches ne sont pas obligés de comprendre votre trouble anxieux, mais qu’ils doivent le respecter.

Et qui sait, vous pourriez même être agréablement surpris·e par leur réaction. 

COB-FR-NP-00113 – mai 2024

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